Septembre marque le 1er anniversaire de Sans dire un mot. Pas de champagne, pas de voyage à Cancun à faire tirer. Juste la fierté de ne pas avoir abandonné et d’avoir peaufiner un peu - ça paraît? - mon style. L’objectif de l’année 2: plublier plus souvent, avec plus d’assurance et donner une identité à ce qui ressemble actuellement à une courtepointe.
Dans le texte d’aujourd’hui, pas question d’élection, de notre nouveau roi ou de 3e lien. J’avais plutôt envie de parler de mort, de Star Trek et de noms composés beaucoup trop longs.
Bonne lecture!
On est rendu là mes amis! En 2022, les personnes décédées peuvent jaser avec leurs proches. Sortez la télé 4K et vos lunettes 3D, feu pépère va nous dire où il a caché son magot! Mais commençons par le commencement…
L’an dernier, j’ai lu Manuel de la vie sauvage de Jean-Philippe Baril-Guérard. Parenthèse. Quand je vois un nom de famille long comme ça, je pense à mes listes d’élèves- format papier - qui jadis ne permettaient qu’un maximum de 12 caractères.
- « Baril-Guéra?
- C’est Jean-Philippe Baril-Guérard, monsieur. Présent!
- Vais essayer de m’en rappeler demain. »
Fin de la parenthèse. Cet excellent livre, donc, a depuis été adapté au théâtre chez Duceppe et a fait l’objet d’une série télévisée. Je vous résume ça. Trois jeunes démarrent une start-up (jeune pousse, selon l’OQLF) et commercialisent une application qui permet de converser avec une personne décédée. Une intelligence artificielle apprend et reproduit la voix de la personne défunte. L'histoire aborde le côté éthique d'une telle invention tout en montrant les aspects sombres de la race humaine lorsque la croissance d’une entreprise de la nouvelle économie se fait au mépris des considérations humaines. De la pure fiction quoi!
Peu après, je tombe par hasard sur un article mentionnant que Microsoft s’intéresse aussi à la conversation avec les morts. La firme de 110 milliards a déposé un brevet pour créer un chatbot (agent conversationnel, selon l’OQLF). Bill Gates voudrait produire des doubles numériques des défunts à partir des données laissées par ces derniers - et il y en a! - pour discuter avec leurs proches. Baril-Guérard a-t-il été influencé par cette nouvelle pour écrire son roman? Peut-être, mais il est troublant de savoir qu’une compagnie en fasse la proposition, même sous forme de brevet. Pensez à toutes les données semées à tout vent par les millénariaux. Les agents conversationnels de Microsoft risquent de faire pas mal de fautes de français, genre : « té tu down pour chillé au skate a soir? 👀🤘🌛» Ça va faire de belles conversations!
Et voilà que cet été, pendant que Méchant Boris se faisait mettre à la porte de Darling Street, une Britannique morte et enterrée a répondu par vidéo aux questions de ses proches, lors de ses funérailles (voir image ci-dessous). Le tout facilité par une application d’intelligence artificielle d’une entreprise dirigée par son fils. La nouvelle a fait le tour du monde et certains journaux en ont rajouté une couche en prétendant qu’il s’agissait d’un hologramme parlant. La défunte aurait même révélé des secrets de famille! Comme quoi il n’est jamais trop tard.
On se croirait dans Star Trek ou plutôt dans un épisode dystopique de La P’tite vie. Et c’est disponible pour monsieur et madame Tout-le-monde à partir de seulement 49 $. À ce tarif, la révélation des secrets de famille n’est pas probablement pas incluse. Mais c’est quand même pas cher pour entendre feu mononcle Albert nous raconter à nouveau ses anecdotes de jeunesse! Vous pouvez même en faire l’essai gratuitement, sur le site de StoryFile, et discuter avec William Shatner, oui LE capitaine James T. Kirk. Je sais qu’il n’est pas encore mort, mais M. Kirk a pris de l’avance. Personnellement, j’aurais choisi Rénald « Pinson » Paré. Lui, au moins, il en aurait eu de la jasette!
Remarquez qu’il reste encore quelques boulons à ajuster. M. Shatner n’a pas compris un traître mot, moi qui parle un anglais «irréprochable». Et on est loin de la discussion fluide. Ça ressemble davantage à un monologue de Max Headroom. Donc l’intelligence artificielle s’intéresse aux morts et de nombreux autres projets similaires sont en cours. On peut comprendre les motivations des proches à utiliser ces technologies: le départ soudain, la douleur de la perte, l’impossibilité de faire des adieux, etc. Mais jusqu’où peut-on aller pour satisfaire ce besoin naturel sans causer de tort? Vous savez, les cinq étapes du deuil?
Je ne veux pas faire de débat éthique sur le sujet, je n’ai pas les compétences ni l’intérêt pour le faire. Je suis un roi du silence, vous vous rappelez? Mais pas besoin d’être un bollé en éthique et culture religieuse pour comprendre que le club des milliardaires a flairé la bonne affaire et est prêt à faire quelques entorses pour profiter de la douleur des gens. Personnellement, moi qui n’est pas trop jasant de mon vivant, ça ne devrait pas trop changer une fois de l’autre bord. Garder votre 49 $ pour des fleurs.
Dans mon prochain texte, je vous indiquerai quoi faire avec toutes les données que vous laisserez derrière après votre grand départ. La mort, un sujet inspirant! Vos commentaires sont toujours appréciés!
Phylippe